Il me revient de merveilleux souvenirs, de cette période de pessah en Tunisie.
Les odeurs de la osbana entrain d'être confectionnée par ma mère, dans la cuisine inondée de soleil, la cour est pleine de récipients, marmites, les enfants des voisins et Dominique mon neveu jouent et rient devant les faitouts et tous les ustensiles en aluminium qui étincellent sous le soleil.
"L'aide mènagère", la bonne était le mot utilisé, Maâouya, astique la vaisselle, assise sur les marches qui mènent vers la terrasse, elle frotte avec le "mzar" et le savon vert. Elle asperge d'eau, de seaux d'eau...
Les voisines , Ouassila, la fille de el behi, omi aroussia,omi hourya guarmattou, vont et viennent"yé omi Alice, rabbi eynik, andekchi kaabè karisse, andèkchi tarf saboune", Diziri(moi) amlétlekchi tilifoune, ouèyne msarfra lyoume, j'étais hôtesse de l'air???????, et ma mère majestueuse, dans son sodli(long peignoir en zanana), vert, rouge ou jaune clinquant qui poursuit sa cuisine, surveille les petits enfants, sert les voisines, donne des ordres à la bonne, à Omi Mnèya garbouje, ma nourrice, à Mouldi Khayèche, le cuisinier, pâtissier, aide mènager de la famille qui est train de sermonner Tahar, appelle Omi Hourya mart Kacem el behi qui est dans la skifa et qui mange des glibettes en cousant le dernier tablier d'école de Dominique mon neveu tout en devisant et plaisantant avec Chouchou Kaka. Voilà le facteur, il apporte deux lettres une de chez Raymond mon frère de Paris, une de mon frère Joseph de Montpellier, "ma mère, le fait rentrer lui offre de suite, une citronnade,la rituelle cuillère de confiture de grenades et prenant le courrier "nsallah khir", elle parcourt les lettres et les larmes inondent ses joues, ses yeux mordorés brillent, "Rabbi yesslah raïkom yé oulédi, ijibkom fil khaîr, le imaradkom", elle appelle "yé mridekh, yè mridekh oueynek??, elle le trouve et lui tend le courrier il est assis sous la vigne sur sa chaise longue entrain de parler avec baï el tounsi, "oulèdek kitbou jouebe mon père qui ne lit ni ne parle le français , les prend, les sent ces lettres, comme si l'odeur de ses enfants était dans le courrier, et les pose sur ses genoux , il dit "lé yaghssarkom fi bilèd el ness, le imaradhom, lé ifrakhom, yhanènekome alé b3aadkom, yé mehir, yé youssef," prénoms arabes de mes frères. A l'intérieur des lettres, il y a des photos, il les sort, "chouf chouf yè alisse, benti Michou ou Khouhé Iric, chouf mahléhom, une autre photo et il dit "houté, tbarkala mahléhé courine bint mehir. Ye mechmech, yé iric, yé courine rabbi yaiechom ou farahkom, farahtouni lyoum. Il embrasse dix , vingt fois les photos et appelle " Ijjé yè Dommi, ijjé chouf, okhtek ou ouled 3amek, yaich oueldi, khalli el ballé ou ijjè!
et le canoune brule ses charbons, son encens, le thé rouge de omi halima, bout et rebout, elle lave dans la "badilla" le linge avec la "boutchia" et s'arrête de temps à autre pour le passer d'un minuscule verre à un autre, le siroter et en proposer avec insistance "dhouk dhouk yaichèk", sirop de thé tord boyau et oh combien sucré, son goût âpre est encore au fond de ma gorge nouée par ces souvenirs.
Les images passent et repassent, les voix hantent mes oreilles, les odeurs enivrent mes papilles, les larmes sillonnent mes joues,j'aurais tant voulu, j'aimerai sencore et encore sentir le baiser de mon père sur mon front et la douceur des lèvres de ma mère sur mes joues................................
Nostalgique je suis et le resterai.